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Emmanuel Macron a dénoncé, jeudi 17 octobre, au soir un « manque de professionnalisme » des ministres, des journalistes et des « commentateurs », leur reprochant des « propos déformés » sur la création de l’Etat d’Israël, qui ont donné lieu à une vive polémique avec le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, et de vives critiques du président du Sénat, Gérard Larcher.
« Je voudrais me permettre de rappeler quelques règles », a lancé le chef de l’Etat, très remonté, en préambule de sa conférence de presse à l’issue d’un sommet européen à Bruxelles. « Je dois vous dire combien j’ai été stupéfait de lire tant de commentaires, de commentaires de commentaires, de réactions, y compris de responsables politiques, étrangers ou français, devant des propos que j’aurais tenus sans se poser la question de savoir […] ce que j’aurais exactement dit », s’est indigné M. Macron. Il a ajouté que « tout cela est une preuve au fond d’un délitement du débat public et d’un manque de professionnalisme des ministres qui ont répété des propos déformés, des journalistes qui les ont repris et des commentateurs qui ne se sont pas attardés à la réalité et à la véracité de tels propos ».
En cause, des déclarations du chef de l’Etat rapportées par des participants au conseil des ministres, mardi : « M. Nétanyahou ne doit pas oublier que son pays a été créé par une décision de l’ONU », avait lancé Emmanuel Macron selon ces sources, alors qu’était abordée la guerre à Gaza et au Liban. Il exhortait ainsi le premier ministre israélien, avec lequel il a multiplié les passes d’armes ces derniers jours, à ne pas « s’affranchir des décisions de l’ONU », selon ces mêmes participants.
Ces propos ont aussitôt déclenché de vives interrogations sur une possible remise en cause de la légitimité d’Israël et jusqu’à un rappel à l’ordre du troisième personnage de l’Etat, Gérard Larcher.
La création de l’Etat d’Israël a été obtenue « avec le sang de combattants héroïques, dont beaucoup étaient des survivants de l’Holocauste – notamment du régime de Vichy en France », a asséné M. Nétanyahou.
« Mettre en doute l’existence d’Israël touche pour moi à des questions fondamentales », a renchéri le président du Sénat, ciblant frontalement le président de la République en lui reprochant une « méconnaissance de l’histoire de la naissance d’Israël ».
Prenant le contrepied de ces accusations, Emmanuel Macron s’en est donc pris tout à la fois aux « ministres », aux « journalistes » et aux « commentateurs », en démentant ses propos « tels qu’ils ont été rapportés ». « Je crois que je dis suffisamment sur la situation au Proche-Orient pour ne pas avoir besoin de ventriloque », a-t-il fustigé. « Il y a chaque semaine des conseils des ministres, qui sont rapportés à la presse par la porte-parole du gouvernement et par un communiqué », a déclaré le chef de l’Etat. « Pour le reste, a-t-il poursuivi, il appartient à chacun des participants à ce conseil de se montrer respectueux des règles et de ses fonctions par éthique, par discipline personnelle, pour ne pas faire circuler des informations fausses, tronquées ou sorties de leur contexte. » Quant aux journalistes, il les a sommés « de traiter les propos rapportés avec les précautions qui s’imposent », sans préciser ce qu’il aurait exactement exprimé au cours du conseil des ministres.
« Il n’y a pas d’ambiguïté », la France n’a « jamais fait défaut » à l’Etat d’Israël, a insisté Emmanuel Macron. Les invectives à répétition avec Benyamin Nétanyahou, déclenchées par l’appel du dirigeant français à cesser de fournir à Israël des armes servant à pilonner Gaza et le Liban, ont aussi trouvé de nombreux échos dans la communauté juive et dans la classe politique française.
« Les propos attribués au président de la République, s’ils sont confirmés, sont une faute à la fois historique et politique », avait estimé le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Yonathan Arfi, sur X.
Au sein même du camp macroniste à l’Assemblée nationale, le groupe des députés Ensemble pour la République a eu des « discussions un peu houleuses » en interne sur sa boucle de messagerie, selon un participant. Des députés de l’ex-majorité présidentielle ont aussitôt salué la démarche du chef de l’Etat à un moment où il apparaît de plus en plus isolé après le séisme de la dissolution.
« La voix de la France dans le monde mérite mieux que le travestissement de la vérité », a répliqué, jeudi soir, le député (Renaissance, Val-de-Marne) Mathieu Lefèvre, ancien président du groupe d’amitié France-Israël à l’Assemblée, sur X.
Plus ironique, le porte-parole du groupe écologiste et social à l’Assemblée, Benjamin Lucas, s’est interrogé : « C’est vrai ça les journalistes, pourquoi ne reprenez-vous pas simplement et bêtement les communiqués officiels ? »
L’Association de la presse présidentielle a, pour sa part, estimé que le président de la République mettait « gravement en cause la déontologie de la presse ». « Notre travail ne peut se résumer à reprendre les déclarations officielles », a-t-elle pointé sur X.
Le Monde
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